Une certaine personne de ma connaissance s’étant vue offrir un repas au restaurant le Fantin Latour à Grenoble, je me suis dévoué pour l’accompagner par pure solidarité. Aux médisants qui ne croiraient pas en mon dévouement, je répondrai : » si, je me suis forcé, ce boui-boui n’est même pas étoilé ! » en me gardant bien d’avouer qu’il est quand même référencé dans le fameux guide rouge et qu’il a reçu 4 toques de la part de Gault et Millau.
Je ne peux malheureusement pas vous dire si la carte est alléchante et si la cave est riche et pleine. En effet, nous nous sommes laissés mener à l’aveugle par le chef sur un repas en huit temps, les vins accordés aux plats.
Nous avons tout de même imposé notre volonté en commandant un cocktail avant toute chose (viril, la rébellion !). Et bien on a bien fait : cocktail fruits exotiques, limoncello, rosé pétillant et purée de poivrons du jardin. C’était envoutant et a bien fait son office de développer notre imaginaire sur les autres surprises que nous réservait le chef. La photo ci-dessous a été maquillée afin de préserver l’anonymat de la personne m’accompagnant (ou que j’accompagnais, bref…), de fait toute ressemblance avec quelqu’un buvant des IPA sera niée.
Les papilles sont dans les starting blocks, le serveur s’approche, c’est parti !
Round 1 : mise en bouche. Ambiance automnale assurée par la végétation de saison (aka morte) qui orne le miroir utilisé en guise d’assiette ! Entre les branches, petite pomme rôtie farcie aux légumes oubliés (panais, marrons, rutabagas), brochette de foie gras panné au pain d’épices et sa gelée à la lavande sauvage, céleri rave dans son écume.
Round 2 : potage. On est toujours dans des saveurs automnales avec ce velouté de potimarron, écume au thé noir et chutney de noisettes et d’abricots secs.
Round 3 : entrée. Risotto crémeux, crème montée à la réglisse, frontière de câpres et oignons hachés. L’explosivité en bouche de la crème était prodigieuse et m’a absolument conquis même si selon certaine c’était un peu trop prononcé, au risque d’endommager le palais pour la suite du parcours.
Round 4 : poisson. Dos d’espadon poêlé servi sur sa pierre de schiste chaude, caviar d’aubergine, sauge du jardin et éclats de cacahuètes, accompagné d’une sauce aux feuilles d’absinthe sauvage. Superbe création. Cependant, il faut faire attention à ne pas forcement suivre les recommandations du personnel : il conviendrait de verser la sauce sur le poisson mais au contact de la pierre extrêmement chaude, des projections sont à prévoir. Passé cet écueil, on vogue sur des impressions subtiles (à part l’espadon qui est quand même un poisson fort nourrissant).
Round 5 : entremet. Poire pochée tiède, coulis froid gingembre poivre de Széchuan. Alors ça, ça met tout le monde d’accord ! Oui, c’est extrêmement fort en épices et en sucre, mais en aucun cas les papilles ne s’en lassent. Tout bonnement dément !
Round 6 : viande. Revirement complet après ces raffinements et cet exotisme avec un plat du terroir revisité pour l’occasion : potée franc-comtoise parfumée à l’orange et à la truffe blanche d’été. Des légumes pleins de saveurs, de la charcuterie gouteuse et peu grasse. Inattendu et fort appréciable !
Round 7 : fromage. Joli plateau, pas immense mais suffisant : des choses diverses et très bonnes. Servi avec un peu de confiture de mûre et un chutney pommes amandes avec moult épices (bien qu’ayant cherché puis soumis la pauvre serveuse à la question, la composition du mélange reste un divin mystère).
Round 8 : dessert. Tatin pomme banane, pâte aux spéculoos, crème montée vanille clous de girofle, sorbet citron. Efficace ! Pas de chichis là dedans, un énoncé simple qui finit de te combler.
Allez, un petit café par dessus, histoire de profiter encore un peu, de regarder sa montre et… ha oui ! ca fait déjà 3h30 qu’on est là. Et bien en voici une agréable façon de passer un samedi après midi !